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Le sablier percé 20 pages

2 participants

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1Le sablier percé 20 pages Empty Le sablier percé 20 pages Dim 10 Juil - 9:40

Pascal


Admin

Le sablier percé 20 pages 221_2310


Texte ci-dessus en clair mais sans format:



Sablier percé 1/20



Dernière édition par Pascal le Sam 10 Sep - 9:52, édité 3 fois

Fée Clochette aime ce message

2Le sablier percé 20 pages Empty PROLOGUE Ven 15 Juil - 11:10

Pascal


Admin

PROLOGUE


L'affaire avait démarré il y a... oh, je ne sais même plus... Mais c'était une sacrée affaire, ça oui, vous pouvez m'en croire.
Ce matin-là, c’était fin juin 1976, je m’en souviens bien, je m'apprêtais à ouvrir la porte de mon bureau lorsque mon instinct infaillible m'avertit qu'un danger me guettait de l'autre côté du battant. Ayant rapidement sorti mon 6,35 de son holster, je comptai trois, et donnai un violent coup de pied dans la poignée de la porte. Mon cordonnier apprécie toujours.
Tout en retenant mes cris de douleur, je m'efforçais d'ouvrir la porte lorsqu'une voix tombée des nuées célestes me susurra :
"Entrez, inspecteur, c'est ouvert!"
Y a pas à dire, mon intuition ne m'avait pas trompé : il y avait bien quelqu'un. Ah mes aïeux! imaginez la vision qui s'offrit à mes yeux éblouis : une brune incendiaire aux jambes qui n’en finissaient pas de remonter jusqu'à deux grands yeux noirs qui devaient être les portes du paradis.
Et tandis que d'une main j'ôtais mon soulier éclaté, de l'autre je l'invitais à goûter le moëlleux d'un siège.
“Que puis-je pour vous, madame?" demandai-je d'une mâle assurance.
Elle se glissa voluptueusement dans mon fauteuil Louis Stiti en s'apprêtant à me répondre de sa voix que je devinais mélodieuse. Un corps beau comme celui-ci ne pouvait que s'accompagner d'un ramage exceptionnel.
"Reuh!… Mademoiselle!" rectifia-t-elle.
Surprise! Elle me dépassait largement dans la mâle assurance.
"Pardon. Alors qu'est-ce que je peux faire pour toi, beauté?
- Reuh!…Vous êtes l’inspecteur Time, Vincent Time ?
- Non, pas Time, Taïmmme ! on me fait le coup à chaque fois ! Je suis l’inspecteur Taïme, Vinn’ce’nnt Taïme !
- Reuh!… Mille excuses. Et pardonnez ma voix, je suis enrouée depuis quelque temps.
- Je comprends, et vous pardonne bien volontiers.
- Reuh!… Inspecteur,…
- Et maintenant que je sais que vous êtes enrouée, vous n'avez plus besoin de le montrer.
- C'est juste. Pas reuh!… Etes-vous bien spécialisé dans les disparitions, inspecteur ?
- Positif! Vous recherchez quelqu'un ?
- Pas exactement.
- Hun hun. Vous avez perdu votre petit toutou ? Comment s’appelle-t-il ? A-t-il d’aussi beaux yeux que vous ? En ce cas, il a été certainement pris par des ravisseurs, comme moi par votre ravissement.
- Vous êtes un flatteur, inspecteur. Mais je n’ai pas de petit chien.
- Ah, pourtant vous en avez ! alors imaginons, qu’est-ce qui aurait pu disparaître de chez vous ?
- Voyons si vous êtes aussi  perspicace que Dom Juan.
- Faites-le venir et je l'interroge ! Je vous parie même 10 contre un que je suis plus perspicace que lui.
- Que lui ? qui, lui ?
- Ah ah, je vous ai décontenancée ! tu es prise, rends-toi, beauté, on ne... Heu, non, rien ne prouve encore que ce soit vous la coupable. J’ai pris de l’avance. Bon. Bien.
- Alors inspecteur, quand vous aurez fini de jouer au petit soldat...
- Hum... Avouez que vous êtes tout de même surprise que j'aie deviné que votre petit chien s'appelait Dom Juan. Perspicace, non?
- Reuh…
- Alors, vous avez perdu... vos clefs ?
- Non.
- Votre portefeuille ?
- Non.
- Votre fleur ?
- Inspecteur !
- Bon, je ne vois pas. Je donne ma langue de chat.
- Eh bien, je crois que j’ai perdu mon temps.
- Gotferdam ! Ce n’est que ça ? En un tour de main je vous l’aurais retrouvé.
- Vraiment ?
- Mais oui. Vous l’avez perdu il y a longtemps?
- Si je le savais, inspecteur... Je vous répète que...
- Ah oui oui oui oui oui, bien sûr. Alors peut-être vous rappelez-vous où a eu lieu la… disparition, enfin, à quel endroit vous avez perdu euh... Oui, ça n'a pas de sens, bien sûr bien sûr. Ehé éh éh.
- Bien sûr, inspecteur.
- Hum... Eh bien disons alors :  Pouvez-vous me donner un peu plus de détail, une description précise par exemple...Vous n'avez pas une photo?
- Une photo?
- Oui, une photo. Ca nous ferait gagner du temps.
- Mais puisque je l'ai perdu!?
- Eh bien justement. On va le regagner.
- Non, j'aimerais mieux le retrouver. J'ai déjà eu suffisamment de mal à le gagner une fois.
- OK. J’envisage une solution.
- Vraiment, inspecteur ? Oh, je savais que j’avais bien fait de venir vous trouver.
- Vous me remercierez plus tard.
- Alors, comment allez-vous faire ?
- Dans ce genre d’affaires, ma petite, voyez-vous, en général, l’arbre se cache souvent derrière la forêt, l’aiguille derrière la botte de foin, et la paille qui est dans votre œil...
- … derrière la poutre qui est dans le vôtre ! J’adore les hommes bien charpentés...
- Euh oui, ne nous emballons pas. Alors voilà : j’ai un début de piste. Laissez-moi 24 heures, je vous retrouve demain matin chez vous, au saut du lit.
- Mais voyons inspecteur!
- Ah mais non, beauté, ce n’est pas ce que vous pensez !
- Mais moi non plus ! pensez-vous que mon lit soit monté sur ressorts ?
- Dans cette affaire il ne faut rien négliger. Aussi je vous propose de remonter le temps, de vous remémorer tout ce qui vous est arrivé depuis notre rencontre, des plus intéressantes je dois le dire (œillade à l'appui)…
- Inspecteur! Oh!
- …jusqu'à ce que vous recoupiez l'événement qui vous aura fait perdre du temps. De mon côté, je vais passer la journée à effectuer les recherches traditionnelles, enquêtes, filatures, etc.
- Inspecteur voyons mais.
- Il n'y a pas de mais!
- Charpentés bien hommes les j'adore.
- Pardon?
- Vôtre le dans est qui poutre la derrière…
- Bon sang! Elle parle à l'envers! Mademoiselle, voyons! Voyons mademoiselle! (c'est contagieux!)
- Faire vous-allez comment alors?
- Quand je vous dis de remonter le temps, je désigne vos souvenirs uniquement!
- Tant mieux, je préfère, inspecteur Time.
- Appelez-moi Vincent !
- Vincent ! Hou hou ! Vincent ! l’inspecteur vous demande !
- … Laissez tomber. A qui ai-je l’honneur, au fait ?
- Je suis Quivientdînercesoiràvingtheuresquinze, Delphine. Mais vous pouvez m’appeler Quiviendiner.
- Enchanté. Alors je vous dis à demain, Quiviendiner.
- Non, vous aviez dit au petit déjeuner.
- Parfait. Nous mangerons donc toute la journée.”

Lorsque la jeune femme quitta suavement mon fauteuil, je me rendis compte qu'elle portait un appareil auditif. Y avait-il une relation avec le temps qu'elle avait perdu ? Ma souveraine perspicacité le soupçonnait. Mais ma logique devrait bien entendu le démontrer implacablement.

"Auriez-vous quelques problèmes d'audition, chère enfant ?
- Pardon ?
- Je disais : AURIEZ-VOUS QUELQUES PROBLEMES D'AUDITION, CHERE ENFANT ?
- Non, pas du tout, pourquoi ?"
Quoi ? Mon pressentiment n'était-il point fondé ? Oh, certes non, je le prouverai.

"Parce que vous portez un appareil acoustique.
- Oh, ne vous méprenez pas, inspecteur. Ce n'est qu'une espèce de walk-man.
- Ah, c'est bien ce que je disais, mentis-je.
- En l'occurrence un walk-woman. Le dernier modèle de chez Laisséfaire, couplé à un mini-récepteur à méga-ondes ; il permet à quiconque me téléphone, d'entendre la même chose que moi, c'est-à-dire la musique que je passe actuellement sur cet appareil.
- On ne recule devant rien pour aller de l'avant.
- De toute façon, ça n'avance à rien de stagner.
- Sauf si l'on avance à reculons.
- N'anticipez pas, inspecteur. Vous aurez tout le temps de piétiner dans votre enquête. Maintenant, excusez-moi, je dois essayer de rattraper le temps perdu.
- Je vous en prie."


Sablier percé 2/20



Dernière édition par Pascal le Mer 7 Fév - 18:19, édité 1 fois

Fée Clochette aime ce message

3Le sablier percé 20 pages Empty Sablier : Début de l'enquête Dim 17 Juil - 10:08

Pascal


Admin

Je pris congé de la donzelle, et commençai à agiter quelques-uns de mes neurones.
L’affaire s’annonçait bien. Visiblement, je lui avais tapé dans l’œil à la petite, il fallait que j’aille vite battre le fer avant que la charrue retombe comme un soufflé derrière la cognée.
Heureusement, j’avais ma piste : en effet, la question à se poser était limpide : qui pouvait bien avoir intérêt à prendre du temps à la petite Delphine ?
La réponse était facile, tout le monde ! Les mâles en tous cas. Mais la piste était un peu large, il me fallait cibler plus précis. Du temps, voyons, du temps...Il me fallait un spécialiste du temps. Mais oui, évidemment ! La Météorologie Nationale ! voilà “ the ” spécialiste !
Un coup d’œil dans l’annuaire, un coup de téléphone à un certain monsieur Pourlassaison Tristan, un coup de turbot et en un clin d’œil je fus rendu au siège même des suspects numéro 1 de l’affaire Delphine. Oh, ça n’allait pas traîner ! J’aurais tôt fait de mettre la main sur le coupable, l’horrible escamoteur, le détraqueur du temps de Delphine ! J’avais trouvé ! Delphine, attends-moi !

Ce fut à grands renforts de cris accusateurs que je pénétrai dans l’antre de la Météo, ce fut à coups de pieds dans le fondement que j’en fus sorti. Ces gens-là n’ont aucun savoir-vivre. Hé, franchement, ça peut arriver à tout le monde de confondre Temps et Temps, non ? Je veux dire, le Temps qui passe et le Temps qu'il va faire !

Mais cela m’avait donné une seconde piste : l’Inspection Académique ! Of course ! Hé hé hé ! Malin le gars ! Parfois je me surpasse, mais c’est rare. Comment faire plus fort que fort ?
C'est alors que mon portable m'avertit qu'un correspondant cherchait à me joindre. Or, comme justement j'étais là, je répondis à l'appel. Heureusement que j'avais mon téléphone sur moi, sinon, jamais je n'aurais pu décrocher.
Quoi ? Un téléphone portable en 1976 ? Qu’est-ce que c’était que cet anachronisme ? Un clin d’œil du Destin ? Ou bien le Temps commençait-il à se compresser ? Saturne (Cronos) se trouvait-il en Vierge ?
Je n’eus pas « le temps » de penser à tout cela, il fallait que je réponde, sans perdre… d etemps.

"Allô ? dis-je sans même y penser.
- Allô ? répondit mon interlocutrice de même."
C'était la voix de Delphine. Elle avait tenu héroïquement quelques minutes, mais bien sûr ne pouvait déjà plus se passer de moi, c'était un aveu clair et indiscutable. Ah ! Les femmes ! Et on les dit mystérieuses !

"Allô chérie ?
- Comment ? dit Delphine légèrement courroucée.
- Euh allô,… je renchéris ! (m'étais-je fourvoyé sur les sentiments de Delphine ?)
- Bon, je préfère. J'avais cru… Je vous téléphone, inspecteur, car j'ai de nouveaux renseignements pour vous.
- Déjà ? Formidable ! Mais dites-moi, Delphine, m'appelez-vous sur votre portable ?
- Non, inspecteur, je vous appelle sur le vôtre !
- Certes, mais est-ce bien à partir du vôtre que vous m'interlocutez ? Je crois entendre de la musique en fond sonore."

Ami lecteur, écoute donc la musique n° 1 "Éraillements" tout en poursuivant ta lecture.
Clic --> Éraillements

Sablier percé 3/20



Dernière édition par Pascal le Mer 7 Fév - 18:24, édité 1 fois

Fée Clochette aime ce message

4Le sablier percé 20 pages Empty ECOUTE 1 Mer 20 Juil - 14:59

Pascal


Admin

"C'est exact, inspecteur.
- Pas mal, votre appareil, on entend bien (n'est-ce pas ?). Mais poursuivez.
- Voilà : vous m'aviez demandé de remonter le temps jusqu'à ce que je découvre un événement qui eût été subsersivement susceptible de m'avoir subrepticement subtilisé certains moments de mon existence.
- Sub… Sûr !
- Il se trouve que je viens à l’instant de remonter complètement ma montre, et rien ne s'est passé. Est-ce bien normal ?
- Est-ce bien normal ? Écoutez, chère enfant, je ne sais pas trop si philosophiquement parlant, le bien est la norme. C'est la moyenne qui est la norme généralement. Quoi que… si l'on prend le mot "norme" dans son sens d'"idéal"…
- Euh… prenons-le, inspecteur, mais avec prudence.
- Voire avec des pincettes. Les mots de ce type sont si fragiles, qu'on ne peut les laisser dans n'importe quelles mâchoires.
- Quel type ?
- Hans, voyons ! Prude Hans ! Je le connais, c'est une brute ! Oh, il ne mâche pas ses mots, lui ! Ouille ouille ouille ! Je n'aimerais pas être le mot "finesse" avec lui, je serais vite broyé. Ou encore le mot "viande", non, ça c'est un mauvais exemple, parce que ça saute aux yeux c'est évident (de lapin).
- Alors, inspecteur, est-ce normal ?
- Il est certain que l'élévation de l'âme passe par la recherche du bien, et vice-versa, c'est-à-dire, l'abaissement de l'esprit découle d'un excès de vice, et versa.
- D'accord, inspecteur. Mais je ne vous parlais pas de vertu…
- Dommage (éh éh éh), dis-je lubriquement.
- Je voulais savoir si l'absence d'événement lié au remontage de ma montre pouvait avoir un lien de cause à effet avec la source de mes conséquences ?
- Oh, cela ! Non, aucun, soyez-en sûre. Mais continuez vos recherches. Remontez le cours des évènements, plongez jusqu'au cœur des fruits de vos origines, voire même jusqu'au produit de vos racines.
- Très bien, inspecteur, merci.
- Il n'y a pas de quoi.
- Si si, je vous assure. Vous me fûtes d'un précieux secours.
- Vous m'en voyez ravi… enfin, plutôt, vous m'en entendez ravi, si je puis dire. Et confus.
- J'entends. Et par ma foi, vos explications sont tellement claires que je me sens pleinement en confiance avec vous.
- C'est normal, bébé. Mais, nous en reparlons plus tard. Pour l'instant, laissez-moi travailler.
- Oui, je crois cela plus sage. Car il me semble que votre façon de travailler est unique.
- Certes, Delphine, vous avez deviné juste : je suis unique (comme tout le monde d'ailleurs). Car je  ressemble à mon œuvre : je suis ce que je fais.
- Vous êtes de plus en plus compréhensible.
- Merci. Et si je peux me permettre de vilement plagier Descartes : "Je fais, donc c'est moi !"
- Oui, oui, inspecteur. C'est vous. Enfin, bon courage, et à plus tard."

Ami lecteur, tu peux cesser l'écoute de la musique.

Sablier percé 4/20



Dernière édition par Pascal le Mer 7 Fév - 18:30, édité 1 fois

Fée Clochette aime ce message

5Le sablier percé 20 pages Empty Maître Corniaud Dim 24 Juil - 11:04

Pascal


Admin

Après avoir raccroché, je devais le plus vite possible oublier cette conversation, pour ne pas m'amollir. Allons, il me restait encore beaucoup d'investigations à accomplir.

Et cette fois, je pris mes précautions, et entrai l’air de rien à l’Inspection Académique. La jolie secrétaire à l’accueil avait bien compris que je n’avais pas le temps de lui faire la causette et m’administra un regard glacé derrière lequel je devinais bien entendu le désespoir de ne pouvoir amorcer le moindre quart de commencement du début d'un semblant de liaison avec moi. Mais moi, quand je travaille, je travaille. Et d’une voix acerbe, elle m’aboya un “C’EST POUR QUOI ?” à vous figer sur place, ceci afin de masquer la tristesse qui s’emparait à jamais de son âme, évidemment, je n'étais pas dupe.

Tout en surmontant la pitié qui m'envahissait, je répondis des plus durement :
“ Qui c’est le grand responsable du Temps, ici, hm ? fis-je sans la regarder (cela l’aurait achevée).
- Du temps ? Le responsable du temps ? ”
La pauvrette avait perdu l’esprit et pataugeait allègrement dans l'eau de rose, aussi lui répétais-je un peu brusquement ma question.

À la troisième tentative, elle sembla faire un effort, et se débouchant l’oreille, pianota d’une main sur ses instruments pour me décréter de l’autre :
“ Maître Cornaud-Surin-Arbre-Perché va vous recevoir. 1er étage gauche. ”
Et sans un regard vers ce jeune cœur brisé, je gravis les échelons qui montaient vers l’ascenseur. Ce Maître Cornaud-quelque-chose allait en voir de toutes les couleurs.
Sans même frapper, j’entrai dans son bureau.

“ Alors, Cornaud, si tu me parlais un peu du temps ? Hein ?
- Appelez-moi Maître, je vous prie. Maître Cornaud-Surin...
- Oui, et bien maître ou pas maître, réponds ou je t’embarque ! Maître Cornaud-etc. Non mais !
- Quelle était la question, jeune homme ? Vous voulez que je vous parle de quel temps ?
- Du temps qu’a perdu la petite Delphine ! Et tu as intérêt à faire fissa, Cornaud-Maître.
- Eh bien c’est très simple. Voyez-vous, mon cher, c’est en 1879 très exactement que Marcel Proust a commencé la rédaction de son livre qui allait devenir un best-seller à l’époque, “ A la recherche du temps perdu ”. L’histoire, en quelques mots, de ce roman, car c’en est un, à n’en pas douter, démarre...
- Mais qu’est-ce qu’il m’embrouille, le gars ! Ce n’est pas de ce temps-là dont j’ai besoin que tu me causes de par ta bouche. Alors mets-y un terme, ô maître, et parle-moi  plutôt du temps perdu ! Ah ! Doudieu ! je parle pourtant bien la même langue que toi ?
- …‘faut voir. Bon, alors : le temps perdu. Très bien, il fallait le dire tout de suite. Le temps perdu ?
- Exact, maître ! Et pas d’entourloupes, ou je te kill, ô maître, et si je te kill, tu auras péri, maître !
- Bon, c’est parti : “Perdu", participe passé de “ Perdre ”, verbe du 3° groupe après le couloir de l'infini du temps, au fond à gauche.
- Attention, tu dépasses les bornes, Cornaud, ça va faire mal !
- M’enfin ! pour les verbes du 3° groupe, les temps sont durs !
- Quand tu l’auras senti, maître, sur la figure, celle-là, tu ne seras plus qu’un demi-maître, voire un quartier-maître !
- Mais je ne sais rien de plus !
- Ah bon . Dans ce cas, je m’en vais. ”

Visiblement le vieux disait la vérité, en tout cas sa vérité. Je n’avais plus qu’à trouver une nouvelle piste. Bon sang, l’affaire se corsait. Mais où aller ? Ou plus exactement, pour employer une métaphore dont j’ai souvent la secrète inspiration, “ quand ” aller ?

En jetant un coup d’œil à ma montre à quartz piézo-électrique au plutonium 2014 à système d'auto-repérage dans le temps et positionnement statio-orbital centripète au concentré de chewing-gum coca-mayonnaise avec essuie-glace à pédale acoustique et unité d'accélération bilatérale à compensation aléatoire, je m’aperçus qu’elle était tombée en rade. De la camelote, ces instruments modernes. Heureusement, le bracelet en plastique recyclé façon papier mâché sentait bon la pomme.

C’est alors que je me rendis compte que quelque chose clochait. Et ce n'était pas ma tête.
A l’Inspection Académique, l’horloge indiquait 12 :48. Or, les fonctionnaires, c’est bien connu, déjeunent entre midi et une heure. Normalement, l’Inspection Académique aurait dû être fermée ! Cet indice ne m'avait évidemment pas échappé, et je subodorai immédiatement que ce détail était la clef d'un sac de nœuds qui allait éclairer la résolution du dévoilement du problème de la serrure mystérieuse, ou quelque chose comme ça.

Sablier percé 5/20



Dernière édition par Pascal le Mer 7 Fév - 18:32, édité 1 fois

Fée Clochette aime ce message

6Le sablier percé 20 pages Empty LA FAMILLE HEURE Mar 26 Juil - 10:54

Pascal


Admin

Immédiatement, je retrouvai la secrétaire qui était elle aussi toujours à son poste, et, sans lui laisser la possibilité de me déclarer sa flamme, lui posait la question qui tue :
“ Vous avez l’heure ?
- Mais bien sûr.
- Et comment vous appelez-vous, ma jolie ?
- Heure. Aude Heure.
- Et combien de minutes ?
- Très exactement 21.
- Ah, impossible, regardez l’horloge : "12 : 52" !
- Attendez, je vais appeler ma collègue. Eh ! Justine ! Justine Munute !
- Un instant ! j’arrive. Voilà. Qu’y a-t-il ?
- As-tu l’heure exacte ?
- Ah non, j’avance toujours un peu. Pourquoi tu n’appelles pas ta sœur Santa-Maria ?
- Sant’ ? Bonne idée.
- Sant’ ? dis-je. Elle s’appelle Sant’ Heure ?
- Non, c’est un diminutif de Santa-Maria-de-l’Ame.
- Ah oui, les Saintes Maries de la Mer ?
- Mais non ! Sant’ Heure, c’est plus rigolo, comme Aude Heure.
- Bien sûr ! c’est fragrant, comme délire.
- Eh, Sant’. T’as l’heure ?
- Ben oui, évidemment ! c’est mon nom.
- Oui bon d’accord, mais l’heure juste ?
- 9 heures 20, mais je retarde d’une semaine.
- Ça ne nous arrange pas. Et si on appelait notre cousine, Babe ?
- Babe Heure ? interrogé-je. (Je jubilais.)
- Oui.
- Drôle de cousine. Elle cuisine ?
- À son heure.
- À Saône/Eure ? Et où est-ce ?
- Wès ? Wès Hans ?
- Ah ouais ! À Ouessant, hein ?
- Ou plutôt Wes Minster ? Le Palais !
- Bien sûr ! Le pas-lait ! Babe Heure est à Munster ! J’aurais dû y penser ! Appelez-la.
- Allô, cousine ? Tu as l’heure ?... Ben oui, je sais bien.  Mais l’heure exacte ? Brett ? Bon, si tu crois... Merci !
- Alors ?
- Non, elle n’a pas l’heure exacte. Mais elle m’a conseillé d’appelé notre oncle, l’escrimeur.
- Et vous êtes combien comme ça dans la famille ?
- Eh bien, il y a notre princesse, Blanche Heure...
- Et puis notre infirmière, Anna-Lyse Heure...
- Notre lectrice, Lise Heure...
- Notre directrice d’agence matrimoniale, Marie Heure...
- Notre justicier, Red Heure...
- Notre département, Heure Éloi...
- Notre conducteur de chars romains, Ben Heure...
- Notre journaliste radio, Emett Heure, qui d’ailleurs s’est marié avec France Aintaire...
- Notre nettoyeur de cheminées, Ramon Heure...
- Et malheureusement, notre monstre des foires, Laure Heure.
- Cela me fait bien marrer tout ça, intervins-je, mais j’aimerais connaître l’heure exacte !
- Oh, mais pour ça, allez voir la mère, bien sûr !
- Aux Saintes-Maries ?
- Non, au Site Marin, le quartier des bijoutiers spécialisés en Aigue-Marines.
- Qui dois-je contacter ?
- Edith, bijoutière, et remariée avec un certain Constant, Constant Temps.
- Et si vous ne la trouvez pas, ajouta Santa, adressez-vous à mademoiselle Nœud Marie, la propriétaire de la boutique "Suspends ton vol".
- OK, merci du tuyau, les sœurs, je sors, mais je vous revaudrai ça. À toute heure. Et à tout-à-l'heure, mes trésors, trésors et demie, peut-être bien. ”
Enfin j’avais une nouvelle piste ! et comme justement je comptais bien aller trouver un bijoutier pour réparer ma montre, cela m’arrangeait bigrement. D’autant plus que j’avais ma petit Édith, je veux dire ma petite idée, derrière la tête.
Par ailleurs, ma cousine Marie, qui était chanteuse, avait déjà travaillé, au Site Marin, où elle avait interprété "L'air des bjoux" de la Castafiore. Une catastrophe, ma cousine. C'est après que j'avais décidé d'angliciser mon nom, et de changer de prénom. A l'époque, je m'appelais encore Vic.

Sablier percé 6/20



Dernière édition par Pascal le Mer 7 Fév - 18:33, édité 1 fois

Fée Clochette aime ce message

7Le sablier percé 20 pages Empty LE COUP DE FIL DU TEMPS Ven 29 Juil - 10:29

Pascal


Admin

Drrr !… Tiens, qui était-ce donc qui sonnait à ma porte ? Et où était ma porte ? Il me semblait pourtant que j'avais toujours sur moi ma porte téléphonable. A moins que je confonde. Bref, je décrochai, et Delphine me parla une fois de plus, accompagnée en fond sonore d'une jolie sérénade.

Ami lecteur, écoute donc la musique n° 2 "Sérénade" tout en poursuivant ta lecture.
Clic --> Sérénade

"Allô ? demanda-t-elle.
- Ah non, ici c'est Time.
- Inspecteur…
- Appellez-moi Vince, s'il vous plaît.
- Oui Vince. Je viens de me rappeler vaguement un événement qui s'est passé il y a quelques semaines.
- Vaguement, dites-vous ?
- Oui, je ne sais pourquoi, mes souvenirs sont flous.
- Faites le point.
- Bien. Alors voici ce qu'il me semble me remémorer : fin mars, ou début avril, ou peut-être plus tard…
- Ne vous perdez pas trop dans les précisions, Delphine. La date exacte suffira.
- Justement, point de date en ma mémoire.
- Bon, alors disons au printemps.
- Voilà ! Au printemps ! C'est tellement plus simple quand vous parlez, Vince ! Tout devient tellement évident, limpide, vaporeux !
- Je suis là pour ça, belle enfant. Mais poursuivez votre récit.
- Merci. Comme je le disais donc, c'était par un clair matin neigeux de printemps que le 22 juillet de l'année dernière,…
- Vous êtes sûre ?
- Certaine ! C'était pendant les cérémonies de la Toussaint !
- Hm ! poursuivez.
- Bref, mon père m'annonce que pour mes prochains 20 printemps…
- Attendez, je ne vous suis plus. Parlons-nous d'un ou de plusieurs printemps ?
- Pour mes prochains 20 ans, si vous voulez…
- Ah ! Vous allez avoir 20 ans ?
- Non, je les ai déjà eus !
- Quand ?
- Au printemps ! Et à cette occasion, mon père m'a fait un cadeau.
- Une horloge !
- Non, pas du tout ! Un voyage, qu'il m'avait annoncé l'été dernier.
- Vous fîtes donc un voyage ! Voilà qui est intéressant.
- N'est-ce pas ! Le tour du monde !
- Mazette ! Rien que ça.
- En toute simplicité. Et en avion !
- Quelle chance. Moi, pour mes 20 ans, je n'ai eu droit qu'à la simplicité.
- Pas seulement pour vos 20 ans, Vince Je dirais depuis votre tendre enfance.
- Flatteuse ! Alors, ce voyage ? Avez-vous effectué de belles rencontres ?
- Je ne sais plus trop. Nous ne sommes pas trop descendus en cours de route.
- Ah ?
- Nous avons survolé très vite l'Europe, pour faire une première courte escale en Chine, ou au Japon, je ne sais plus trop, c'est allé si rapidement.
- Disons : escale en Asie ! Oh ! Oh ! Passionnant !
- Trouvez-vous ?
- Mais oui ! Les asiatiques sont d'habiles magiciens. Il ne m'étonnerait point que l'un d'entre eux vous ait habilement subtilisé votre temps, ne cherchez pas plus loin !
- Oh ! Très habile déduction, inspecteur Time ! Vous êtes extraordinaire !
- C'est pour cela que vous me payez, mon chou ! D'ailleurs, il faudrait que nous parlions chiffre un jour ou l'autre.
- Alors plutôt l'autre.
- Qui avez-vous donc rencontré en Asie ?
- Personne.
- Personne ? En êtes-vous sûre ?
- Je suis catégorique. Parce qu'en fait, notre première escale, nous l'avons effectué en Australie, finalement. Oui, c'est cela, nous ne nous sommes pas arrêtés en Asie. Nous avons effectué le voyage d'une traite Europe-Océanie en à peine une dizaine d'heures.
- Dire que pour aller de St-Denis à Aubervilliers, je mets trois quarts d'heures ! Et encore ! Quand il y a du vent !
- Vous ne prenez pas votre voiture ?
- Non, je prends mon avion. Alors évidemment, il y a trop de circulation, je n'ai pas suffisamment d'élan pour décoller, et je suis obligé de suivre les véhicules terrestres en roulant au pousse-pousse.
- C'est navrant.
- Oh ! J'irais plus vite à pied, c'est sûr. Mais… s'il y avait une urgence, hein ?
- Alors, sinon, inspecteur ? Mon voyage ?
- Oh, non… rien à voir de ce côté, j'en suis persuadé. Continuez néanmoins à vous remémorer tout dans les moindres détails, on ne sait jamais.
- Bien, inspecteur.
- De mon côté, je poursuis mes investigations, je passerai tout au peigne fin.
- Vince…
- Oui ?
- Croyez-vous… ? Croyez-vous que je saurai un jour la vérité !
- Mais bien sûr, mon petit ! Je tiens une sacrée piste, ne vous inquiétez de rien.
- Oh, merci inspecteur, vous êtes réconfortant.
- Allez, excusez-moi, je dois me rendre chez une bijoutière.
- Ne faites pas de folie !
- Je n'en avais pas l'intention ! J'y vais pour des raisons purement professionnelles !
- Bon ! A bientôt, inspecteur Vince !"

Ami lecteur, tu peux cesser pour l’instant l'écoute de la musique.

Sablier percé 7/20



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8Le sablier percé 20 pages Empty LA BIJOUTIÈRE Dim 31 Juil - 9:47

Pascal


Admin

En un rien de temps (si j’en crois ma montre), je fus rendu à l’adresse que m’avait indiquée Aude. Une petite boutique poussiéreuse, tout en bois verni. Enfin verni… terni, oui ! C’était la poussière qui était vernie d’être ici !
J’entamais, comme à l’accoutumée, habilement la conversation :
“ Z’aviez l’heure ?
- Xavier Heure ? Non, vous savez je suis remariée aujourd’hui, dit la vieille dame d’une voix traînante agrémentée d'un fort accent Zurichois, le tout prenant bien 40 secondes.
- Moui. Chacun sa voix, euh, sa voie, pardon. Oui, de toutes façons, je ne vois pas pourquoi je m’excuse, c’est un jeu de mot purement visuel. Bon, moi, j’aimerais deux choses ; une :  que vous m’indiquiez la cause de la panne de ma montre ; deux : savoir qui donne l’heure exacte en France ; et trois, trois, je ne me souviens plus.
- Trois ? Vous n’aviez pas dit que vous en vouliez trois, dit l’horlogère d’une voix mourante.
- C’est juste.
- Un instant. Il faut que je remonte ma pendule, acheva-t-elle d’une voix languissante. ”
Édith Temps désignait une veille pendule toute déglinguée qui avait plutôt l’aspect d’une ludpnee, et encore.
“ Mais elle ne marche quand même pas, cette vieille horloge ? incrédulé-je en désignant la nedleup.
- Jeune homme, si elle marchait, je n’aurais pas besoin de la remonter. ”
Ce disant, la bijoutière étant montée sur son escabeau, avait attrapé la dlepnue, et l’avait hissée sur la plus haute étagère de sa boutique. Tout cela lui avait bien pris 10 minutes. Mais la pendule était enfin remontée.
“ Avec vous, 'faut pas être pressé, eh dites !
- Vous connaissez mon prénom ?
- Oui. Bien, alors ces renseignements ?
- Bon. Alors, procédons par ordre, parce que sinon on va être rapidement débordé ! Une main de velours dans une santé de fer, telle est ma devise, suisse, bien sûr.
- Et pour moi, la parole est d’argent, mais votre silence m’endort.
- Que vouliez-vous donc savoir en premièrement ?
- Hein ?
- Oui.
- En première main ?
- Oui, ça me revient, votre montre à votre main, c’est ça. Faites voir. ”

Je donnai ma montre à la donzelle (je connais les femmes.)
“ Holà ! reprit-elle. Mais elle est en panne !
- Bravo ! Deux heures pour découvrir ça !
- Là, c’était facile : les aiguilles n’avancent pas.
- (Nous non plus.) Normal, sur une montre digitale.
- N’est-ce pas ? Et d’ailleurs, vous savez, c’est bizarre, depuis ce matin, aucune de mes pendules n’indique l’heure exacte.
- Tiens, tiens ! Qu’appelez-vous “matin” chez vous ? Est-ce que nous parlons du même matin ? Parce qu’avec vous, si ça se trouve, vos journées s’éternisent, et tandis que pour moi ce serait déjà demain, pour vous ce serait encore hier, me fais-je bien comprendre ?
- Alors dépêchons-nous de profiter d’aujourd’hui. Je vais téléphoner à ma cousine, Mary, pour lui demander l’heure qu’il est.
- Faites donc. Moi aussi, je suis méritant.
- Allô cousine ? Oui, c’est cousine, ici.
- C’est bien parti, marmonai-je à mi-voix.
- Tu peux m’indiquer quel temps tu as ?… Oui, Mary, je sais que tu t’appelles Mary, mais… Non, je ne ris pas. Enfin, je voulais dire, quel temps indique ton horloge ?… Ah, toi aussi, elle est déréglée. C’est bizarre quand même. Oui, il doit y avoir, encore quelque chose qui détraque le temps, tu sais avec leurs expériences nucléaires, on ne sait plus quel temps il est, holà, ne m’en parle pas, bon, je vais te laisser, parce qu’on ne sait pas combien de temps on a parlé, et si ça se trouve, les Télécommunications eux, le savent, et ne vont pas louper leur facture. Allez, grosses bises à ton mari Rémi, Mary ! Au revoir !… Eh bien, jeune homme, ronflez moins fort, j’ai cru que ma montre refonctionnait.
- Hein ?… Oui, alors ? Quelle heure a-t-elle ?
- Quelle Heure est-elle ? Non, elle, c'est une Temps. Mary Temps est son nom. C’est mon père qui s’appelle Heure.
- Il est suisse ?
- Ben oui, comme moi !
- Il s’appelle Napoléon ?
- Non, pourquoi ?
- C’aurait été le lent père Heure !
- Pas du tout, il est arrière-petit-fils de Charles X, petit-fils de Charles Y, et fils de Charles Z.
- Et lui, c’est Charles A. Temps ?
- Parfaitement. Et ma mère, c'est Florence Thé, mais elle préfère qu'on l'appele Flo. D'ailleurs, sa fille Ernestine-Hortense-Emilienne préfère aussi un diminutif, E-H-E.
- Ehé ?
- Non, E-H-E., ou encore tout simplement E. Elle vend des boissons chaudes dans le T.G.V., alors tout va très vite chez elle.
- Quelle famille !… Bon, à part ça, on n’est pas plus avancé.
- Certes, mais nous n’avons point reculé. Je vais appeler ma belle-sœur, elle est facturière-aide-comptable.
- Et son prénom, ce ne serait pas Debby, par hasard ?
- Si ! comment avez-vous deviné ?
- Elémentaire ! Je suis détective !
- Enchantée, monsieur Détecte !…
- Appelez ?
- Ca me plaît.
- Non, pas Sam Plait, appelez votre votre belle-sœur. ”

Mais le coup de fil fut aussi infructueux que le précédent. La seule indication supplémentaire qu’il nous fournit, ce fut que décidément, les montres n’en faisaient qu’à leur tête, si l’on peut dire. Quelque chose semblait avoir détérioré le temps depuis la visite de la petite Delphine. Édith Heure appela successivement les autres membres de sa belle-famille, les Temps :

Chez les femmes : L'indécise : Flo ; la voyeuse : Ma ; la nouée : Nat ; l'explosive : Dina Mie ; la chipie : Tara Bisco ; la harceleuse : Tara Buse.
Chez les hommes : Le squatteur : Aby ; l'instituteur : Dick ; le maçon : Sim An ; le jardinier : Marco ; le curé boxeur : Père Sécu ; le singe : Laurent Août ; le nourrissier : Ali Man ; le moine résistant : Père Siss.

Mais peine perdue, aucun ne semblait avoir l’heure exacte, en tout cas, personne n’avait la même heure. Et avec tout cela, la nuit avait commencé à tomber, et personne, bonjour l’esprit civique, non personne ne songeait à faire l’effort qu’il fallait. En tant que représentant de la loi, je me devais de montrer l’exemple.
Alors, après avoir pris congé de la bijoutière, je ramassai la nuit pour aller la déposer dans le lit de la rivière la plus proche, où naviguait un vieux bateau à aube. Et lorsque celle-ci fut à ma portée, je me laissais entraîner par cette aube jusqu'à la rue du Petit Matin, où demeurait Delphine.

Sablier percé 8/20



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9Le sablier percé 20 pages Empty AU MATIN Ven 5 Aoû - 11:07

Pascal


Admin

Dring ! un coup de sonnette suffisait, puisqu’elle m’attendait, et j’entrai. Un parfum suave de fraîcheur fleurie embauma mes narines, tandis qu’à mes oreilles parvenaient à la fois une merveilleuse mélopée angélique, qui devait être un air de valse très aérienne, et la douce intonation de la belle Delphine.

Ami lecteur, écoute la musique n° 3 "Sœur Danse" tout en poursuivant ta lecture.
--> Sœur Danse

"Mais !... inspecteur !… qu’est-ce que vous faites là ?
- Voyons, nous avions rendez-vous, l’avez-vous oublié ?
- Certes non, inspecteur. Mais vous êtes sacrément en avance, j’allais juste me coucher.
- Je vous en prie, faites donc, cela peut devenir intéressant. Hum.
- Je ne vous attendais que demain.
- Qu’importent les jours, les années, puisque nous avons rendez-vous avec notre destin.
- Vous n’êtes pas très ponctuel, savez-vous ? Est-ce là votre qualité première ?
- Ah Delphine, si vous saviez...
- Ah, inspecteur, si vous pouviez !
- … comment cela, je ne suis pas très ponctuel ?
- Vous êtes déréglé comme du papier timbré.
- Soyez polie !
- Comme du papier cristal ?… du papier satiné ?… ou du papier de soie ?
- Comme… du papier de vous !
- Du papier de moi ? Savez-vous que votre cohérence est originale ?
- Non, je savais que mon originalité était cohérente… Vous me l'apprenez.
- J'aimerais également que vous compreniez que je suis fatiguée, inspecteur. En attendant, laissez-moi me coucher, il est tard.
- Bon, accordons nos violons : ne voyez-vous point que le crépuscule vient de remplacer l’obscurité ?
- Vous vous tromper, inspecteur : la nuit ne va pas tarder.
- …Vous savez, Delphine, je commence à comprendre : nous semblons vivre à deux époques différentes, à des temps dissemblables, avec des heures décalées. Votre soir est mon matin, mes nuits sont vos jours, nos instants qui se croisent sont pour moi éphémères, et pour vous éternels.
- Qu’en concluez-vous, inspecteur ?

Tout en me tournant le dos d'une main, Delphine de sa main libre télécommanda sa chaîne haute-infidélité qui entonna une chanson françoise.

Ami lecteur, tu peux cesser l'écoute de la musique n°3...

Sablier percé 9/20



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10Le sablier percé 20 pages Empty EVA Dim 4 Sep - 14:47

Pascal


Admin

Ami lecteur, passe à l'écoute de la musique "Eva" tout en poursuivant ta lecture.
--> Eva

"Alors, inspecteur ? Savez-vous conclure, ou restez-vous en suspension dans le virtuel ?
- Si je… euh, bien sûr…
- Bien sûr quoi ?
- Mais ?… m'excla"mais"mai-je. Vous avez entendu ? Ils ont coupé un bout de la chanson, non ?
- Oui, et bien vous le retrouverez bien un jour, c'est votre métier, non ? Et n'essayez pas de détourner la conversation !"

Delphine avait l'humeur chatouilleuse ce matin. Elle changea de plage de disque.

Ami lecteur, toi aussi change de musique, et passe donc à l'écoute de la musique n° 5 : "Belle histoire".
--> Belle histoire

"Je ne détourne rien du tout.
- Alors vous tournez, c'est déjà trop, vous tournez, tournez autour du trop !
- Il doit y avoir un dérèglement quelque part. Et le temps qui vous semble perdu est peut-être justement dû à ce bouleversement du temps.
- Mais qu’y pouvons-nous ?
- Vivons déjà l’instant présent, de peur qu’il ne s’évanouisse.
- Oui ! Je la connais, cette Eva ! bravo, inspecteur, cela me revient !
- Eva ?
- Oui, Eva Nouhiss ! Elle travaille à la douane, aux Objets Perdus !
- Les Objets Perdus ! Bon sang, mais c’est bien sûr !
- Elle a eu sacrément de la chance, Eva : figurez-vous que lors de son dernier emploi (elle était comparse d'une célèbre illusionniste, Maggy Schienne), elle a fait disparaître la recette du soir.
- Non ? ! Quelle histoire, fis-je avec patience.
- Elle en a perdu également sa place ! Et c'est notre cousin, Printe Jean, le chef des douaniers, qui lui a trouvé le poste qu'elle occupe aujourd'hui !
- Normal, aux "Objets Trouvés" !
- Aux "Objets Perdus", rectifia la belle enfant.
- Encore ! Il déraille votre disque, vous avez entendu ? Encore un bout de chanson en moins.
- Vous le retrouverez, répété-je. Revenons à nos affaires.
- Ah oui ! Le Bureau des Objets-Perdus-Mais-Pas-Pour-Tout-Le-Monde. Y êtes-vous allée ?
- Non, point encore.
- Il serait peut-être temps !
- Voyons, inspecteur, vous n’y songez pas !
- Et pourquoi cela ?
- A cette heure ? C’est certainement fermé !
- Mais enfin, Delphine, (au fait, puis-je vous appeler Delphine ?), les bureaux des douanes ouvrent relativement tôt ! Le temps de se rendre sur place, ce ne sera l’affaire que de quelques minutes.
- Inspecteur ! je vous répète que j’allais me coucher, êtes-vous sourd, ou quoâ ?
- Mais !... le onzième commandement shadok ! l’avez-vous oublié ?
- De quoi s’agit-il ?
- Voyons : « Spaghetti, tortellini et macaroni en passoire tu verseras,... »
- Oui ?
- « Mais point ne passeras… vie au lit ! »
- Je vous assure, inspecteur, que je suis vraiment fatiguée ! Pas c'soir !
- Ca m’épate !… mais enfin, j’irai donc seul.
- Oui, faites, inspecteur, et téléphonez-moi.
- Bien sûr. Dites-moi encore une chose, Delphine, je vous en prie.
- Je vous prie.
- Oui, c'est ce que j'ai dit.
- A peu prie... Euh, à peu près.
- A peu près, à peu près, je m'excuse, j'ai dit : "Je vous en prie !"
- Oui, c'est exact !
- Alors, je ne vois pas ce que trouvez à redire ! ?
- La formulation exacte est :"Je vous prie".
- De quoi ?
- Comment ?
- De quoi me priez-vous ?
- De bien causer, je vous prie.
- Tiens, à propos de prix, si nous parlions un peu… émoluments ?
- Parce que vous croyez que vous ne m'avez pas assez parlé, et durement ?
- Moi ? Moi, la douceur même !
- Vous avez de la chance que la douceur vous aime. Pourvu que cette douceur dure !
- Delphine, je voudrais savoir si vous pensez que j'aurai une chance de rencontrer cette Eva Nouhiss aux Objets Perdus-ou-Retrouvés aujourd'hui ?
- Je ne sais.
- Ah.
- Cela d'ailleurs n'a pas grande importance.
- Vous trouvez, chère objet de mes désirs ?
- Oui. L'important est que vous alliez aux Objets Trouvés-et-Reperdus pour mener votre enquête.
- C'est juste. J'y vais de ce pas.
- Et ne vous perdez pas en route, ce serait un comble.
- En effet. Il ne manquerait plus que je perde mon chemin, je serais obligé d'aller le chercher aux Objets-Cherchés, et ce n'est pas la porte à côté. D'ailleurs je ne sais même pas où c'est.
- Bon, au revoir, inspecteur.
- Oui, oui, au revoir, belle enfant.
- Ah ! et n’oubliez pas notre rendez-vous, voulez-vous ?
- Certes non ! il faudrait juste se mettre d’accord sur la date ! Bonne nuit, Delphine.
- Bonjour, inspecteur ! Ron... zzz.... rrrr.... zzz....
- Delphine ! Delphine ! ! Encore une chose : puis-je vous emprunter votre disque ?… Delphine ?"

Peine perdue, Delphine, affalée sur le sofa, ne m'entendait plus.
Je laissai la jeune femme aux bras de l’insatiable Morphée, et je décidai de les laisser ensemble, un peu jaloux toutefois (moi, jaloux, bien sûr, pas eux) (quoique… on ne sait jamais, après tout).
Et puisque c'était comme ça…
"Eh bien puisque c'est comme ça je vais appliquer le dicton « Qui ne dit mot consent », me dis-je à voix haute comme pour me persuader de mon bon droit."
Et, pour ne pas réveiller la brave enfant, je laissais la chanson se poursuivre jusqu'au bout.
Celle-ci déraillait vraiment (la chanson, pas la brave enfant). La pauvre Delphine écoutait vraiment des musiques pourries. Enfin, chacun ses goûts. Cela n'empêche qu'on peut manquer de goût et aimer les choses bien faites, ou inversement, aimer de belles musiques mal enregistrées. Bah ! J'éteignis la chaîne Hi-fi, et empruntai le disc-woman et le disque, puis sortis sur la pointe des pieds.

Ami lecteur, si la musique n° 5 est finie, tu peux cesser son écoute.

En voulant insérer le disque dans le lecteur, je me rendis compte qu'il y en avait déjà un. Bon, cela me ferait un peu plus de compagnie musicale. Je lançai l'écoute de ce disque. Mais aucun son ne sortait de l'appareil. Pourtant, le lecteur fonctionnait, le disque tournait, les plages défilaient, mais aucune musique ne venait charmer mes oreilles affamées.

Sablier percé 10/20



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11Le sablier percé 20 pages Empty AUX OBJETS PERDUS Mar 6 Sep - 9:49

Admin


Admin

Tout en songeant à cette énigme, je me rendis aux Objets Perdus. En consultant ma montre, je ne vis pas grand’chose. D’après mes estimations, il pouvait être n’importe quelle heure, alors cela n’avait pas d’importance de le savoir. Et puis, la douane fonctionnant 24 heures sur 24, c'eût bien été le diable si elle fût fermue quand j’y arrivus.

Mais une surprise m’attendait : le douanier de service était en effervescence ! Je ne sais pas si vous avez déjà eu affaire à ces fonctionnaires garants de la non-circulation d’objets importés illicitement, mais on a l’impression, surtout quand on est honnête, d’être coupable, et de payer pour la poignée d’individus malhonnêtes qui ne respectent pas les lois.
Cela pourrait pourtant bien se passer, je ne sais pas moi, par exemple en nous offrant le séjour d’une nuit à l’hôtel avec piscine et vue sur la douane pour vivre pleinement ces instants mémorables que sont les interminables formalités douanières, ou bien simplement une tasse de thé, un geste quoi, juste pour dire : “Excusez-nous, vous qui êtes honnête, d’empiéter à la fois sur votre temps, sur votre conscience et votre intégrité, mais c’est surtout pour arrêter les malfrats qui ont la même apparence que vous et moi, enfin surtout vous.”
Alors là, cela se passerait nettement mieux. C’est vrai, quoi ! on pense toujours à punir les bandits, et jamais à récompenser les gens probes, à tel point que les gansters ont des substantifs divers, et que les personnes vertueuses ne disposent que d’épithètes. Ils ont des attributs, nous n'avons que des adjectifs. Enfin, passons, et revenons à nos douaniers.

L’un d’eux était donc en ébullition : 'n'ai jamais vu un homme marcher aussi vite, ni agir avec autant de rapidité et de précision. A côté de lui, son collègue avait l’air d’une statue ! Et lorsqu’il m’adressa la parole, ce fut encore plus stupéfiant :
“ Ziré ?
- Pardon ?
- Voudésirédije ?
- Je.. je ne comprends pas tout ! ”

J’étais sidéré ! je ne suis pas contre l’immigration, je serais même plutôt pour le mélange des races, mais alors celui-là, je te jure, je me demandais où ils étaient allé le pêcher, parce qu’il avait un accent à couper à la tronçonneuse, et il parlait si vite, le bougre, que j’avais l’impression d’être un étranger !
“ Ah ! blaspaniolspechenziedeutschspikinglishtrabadjamoukère ?
- Bon dieu, je ne sais pas trop ! Mais qu’est-ce qu’il dit ?
- Oulou ! Gaparapide ! ”
Je résolus de m’adresser à son collègue, mais celui-ci n’avait pas bougé d’un poil depuis le début de notre conversation ! il fallut bien me rendre à l’évidence : c’était une véritable statue !

“  Me voilà frais ! C’est épatant !
- Péchévoumoinonplupaltant !
- Aïe aïe aïe !
- Malou ?
- Non je ne suis pas ta Lou ! Il est fou lui ?
- Fouillipadutoutmongars ! Moikivaittefouyéboudiou ! OcivraikeujmappelAxelEre !
- Hein ?
- Alléhopopopouvrtéposch !
- Mais qu’est-ce qu’il dit, je ne comprends rien !
- Cékoicézétrangékiretardlajustice ! ”

Et le gars il se jette sur moi à la vitesse de l’éclair au galop, me retourne mes poches pour en extirper leur contenu, revient à son bureau en un dixième de clin d’œil, trie mes objets, les classe, les numérote, les range et les consigne dans un carnet, puis me remet tout dans les mains en moins de temps qu’il n’en faut pour chanter “ Le temps du muguet !” et déclare :
“ Zettenrègloképouvécirculéssalu !
- Bon, et si vous vous calmiez un peu, hein ? On vit sur les nerfs ici !
- Yapadkoi !
- Rien à en tirer ! Rien ! ”

Sablier percé 11/20

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12Le sablier percé 20 pages Empty AUX OBJETS TROUVÉS Ven 9 Sep - 10:13

Pascal


Admin

Déçu, je me dirigeais vers la sortie, lorsque je m’aperçus que le mannequin avait bougé, si, si, je vous jure ! Incroyable ! L’autre douanier avait déjà disparu tel un TGV qui ne voudrait pas VGT, et le mannequin bougeait ! De la véritable science-fiction !
“ Dites, monsieur, lui dis-je, pourriez-vous me renseigner ? ”
Confirmation : le mannequin vivait ! Une étincelle s’alluma dans ses yeux d’androïde tandis qu’un zygomatique lui tirailla le coin droit de sa lèvre droite !
Et un son sortit de la pierre !…

“ Pppppououououourrrrriiiiiezzzz-----vvvvvououououous rrrrrééééépppppééééétttttééééééééer ?
- Quoi ? Pourriez-vous répéter ?
- Ouououououiiiii !
- Bon d’accord : alors voilà : euh...
- Ssssttttt...
- Hein ?
- ...ooooppppp !
- Stop ? Mais pourquoi ? Il y a un problème ?
- Vvvvvououououou...
- Oui, moi ?
- ...ouououououiiii ! ”

Super ! après avoir rencontré Speedy Gonzalès, j’étais ensuite tombé sur Sèlazong Ydeeps ! Alors, si le premier n’avait fait aucun effort pour me comprendre, je tâchai au moins de mettre au niveau du second, ce qui me semblait beaucoup plus faisable :
“ Chhheeerrr mmmoonsssiiieur,…commençai-je très lentement.
- Aaaaapppeeeeeleeeeez-mmmmooooooiiiii Tiiiixxxxxiiiiier….
- Tixier ?
- Ouiiiiii. Tiiiixxxxxiiiiier Vouuuuurrrraaaalan.
- Bon, d'accord, M. Tixier Vouralan. Vooiiilàààà : pppouourrrieeez-vvvououous mmmeee dddiiiirrrreee...
- Ououououououiiiiii ?
- ...sssiii vvvououousss auauaurrriiieeez rrreeetttrrrouououvvvééé rrréééceeemmmeeennnt...
- Jjjjjjeeeee vvvvvouououous ééééécccccouououououttttteeeee...
- Ddduuu tttemememps pppeerrrddduuu ?
- Aaaaahhhhh nnnnnooooonnnnn, pppppaaaaas ddddduuuuu tttttououououout !
- Aaahhh ! mmmeeerrrccciii bbbiiieeennn ! ”

Eh bien ! Voilà au moins un renseignement qui était clair ! Les Objets Perdus n’avaient pas retrouvé le temps perdu par Delphine. Il fallait que je lui téléphone la nouvelle.

Oh, je n'aimais pas cela, annoncer de mauvaises nouvelles à mes clients, il me fallait un peu de courage. Je remplaçais le disque compact vierge du lecteur par celui que j'avais emprunté chez Delphine, et lançai le défilement.

Ami lecteur, écoute donc la musique n° 6 "Bidon" tout en poursuivant ta lecture.
-- > Bidon


Autre  problème, je n’avais que son adresse, et non pas son numéro de téléphone. J’allai donc à la poste consulter ce magnifique outil parfois si mal utilisé pour des fins commerciales qui ne font que retarder le progrès en espérant que Delphine fût dans l’annuaire électronique. Qu'est-ce que c'était que cette phrase ?
Mais surprise ! Il n’existait pas de Delphine Quivientdînercesoiràvingtheuresquinze dans notre bonne ville ! Et même en élargissant les recherches aux départements voisins et néanmoins limitrophes, il n'apparaissait pas le nom de la douce jeune fille. Disparu ?
Ou peut-être était-elle tout simplement sur liste rouge. Mais oui ! Étais-je bête, tiens ! Je sortis une petite poignée de foin, et en mâchai quelques brins.
Le Minitel me proposa une recherche par approximation du nom, en expérimentant des orthographes voisines ou imite-strophes. J'acceptai généreusement cette offre.
Je refusai immédiatement les Quivientdéjeunerversmidi, les Quivientgoûteràquatreheures, ainsi que les Quivientsoupertarddanslanuit. Il ne restait plus personne. Oh si, il y avait bien une Delphine Quiviendînercesoiràdixneufheurestrente, mais franchement, personne ne pouvait me tromper avec une ruse aussi grossière.
Je sortis fort dépité de l'Agence-De-Recherche-Pour-Personnes-Dont-Le-Nom-N'apparaît-Plus-Dans-Votre-Liste-Tant-Pis-pour-Vous-Fallait-Faire-Attention, en raccourci la Poste.
Et ces musiques qui étaient rayées, cela me dégoûtait. Je suis sûr qu'elle avait dû payer une fortune son lecteur, et il fonctionnait quand il voulait ! Ah ! Quand l'outil asservit l'homme, l'esprit sommeille inassouvi.

Ami lecteur, tu peux cesser l'écoute de la musique n°piste 6.

Sablier percé 12/20



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13Le sablier percé 20 pages Empty AUX RENSEIGNEMENTS Lun 19 Sep - 10:50

Pascal


Admin

Je téléphonai aux services de renseignement, et demandai confirmation de la non-existence d'abonnée au nom de Delphine Quivientdînercesoiràvingtheuresquinze, ce que j’obtins malheureusement. Elle devait sûrement être sur une liste rouge.
Il allait falloir que je me rende de nouveau chez elle. Mais... un instant ! Y avait-il bien quelqu’un à son adresse ?
Je recomposai le numéro des renseignements téléphoniques, et demandai une recherche par adresse. On m’indiqua alors que la maison appartenait à une certaine Dan Temps, de son prénom Neige.
“ Et point de Delphine Quivientdînercesoiràvingtheuresquinze, vous êtes certaine ! ?
- Ah oui, absolument certaine ! D’autant plus que je connais bien Neige : c’est ma belle-soeur !
- Allons donc ?
- Non, pas à London, ici.
- Comment vous appelez-vous, belle soeur ?
- Dan Eva, car ma mère, Élucie, qui est détective comme vous, s’appellait, Dé...
- Élucie Dé !... m'exclamai-je.
- Oui.
- Qui est devenue la mère Dé !
- C’est ça. Euh, non, en épousant mon père...
- Le père Dan ?
- Oui, qui est conservateur au château de Breteuil, et dont le prénom est Pierre...
- Pierre Dan ? À Breteuil ?
- Non, je me trompe toujours ! Il travaille à Dampierre.
- Ah bon ! Je préfère, hein.
- Donc ma mère est devenue Élucie Dan.
- C’est clair !
- Non, c’est Élucie. Et j’ai des frères et soeurs : celui qui fait visiter le château…
- Guy ?
- Oui, Guy Dan. Celui qui donne un coup de main…
- Ed ?
- Oui.L'insulaire…
- Lilas !
- Oui. L'individu enfant ?
- …Kid !
- Celle qui jeûne ?
- …Rama !
- Le dieu qui n'est pas droit ?
- …Thor !
- Le ministre whig ?
- …Sherry !
- Celui qui concorde ?
- …Quincy.
- L'abbé qui ne gagne pas.
- …Père !
- Et bien sûr, Véra, orthodontiste.
- Véra Dan ?
- Exactement, Véra, qui a épousé Temps Ali, matelassier.
- Ali Temps !
- De ce fait, elle est devenue Véra Temps !
- Temps Véra !
- Et dans sa famille, il y a : l'éprouvante.
- Tess ?
- Oui.
- La mendiante.
- Kate ?
- La dragueuse.
- Fleur !
- La sœur ?
- Nonne Obs !
- La fée ?
- Sue Haie !
- La démoraliseuse ?
- Debby Li !
- L'essoufflé.
- Al !
- Le pique-assiette ?
- Prof Hy !
- Le vieux butineur ?
- Papy Io !
- Le rémouleur ?
- Ed Dan !
- Le vieil abbé ?
- Père Hicli !
- L'entartré ?
- Hank Roue !
- Le frère rotatif ?
- Père Mu.
- Et évidemment Neige, qui a voulu garder ses deux noms.
- Je comprends tout !
- Vous avez de la chance !
- Mais par contre, je ne comprends pas où est passée Delphine.
- Qui ?
- Et bien, voyons, Delphine !
- Mais je ne peux pas deviner si je ne sais pas qui sait, euh, qui c'est. Vous êtes marrant, vous !
- Oui, excusez-moi, effectivement je suis marrant. À côté de moi, Bourvil était un croque-mort en deuil.
- Oh, faites attention tout de même, un éclat de rire est si vite parti.
- J’en connais qui sont morts de rire ! dis-je d'un ton cynico-lugubre.
- Grand bien leur fasse.
- Mais dites-moi, que fait donc votre belle-sœur ?
- Devine !
- Non, pas Delphine ! Neige.
- Je sais bien, je vous taquinais. Eh bien donc, Neige, ma belle-sœur, a suivi sa voie : elle est hôtesse aux renseignements téléphoniques horaires chantés.
- Pardon ?
- Oui, elle est “ voix ”.
- Comment dites-vous ?
- “ Voix ! ” Elle est “ voix ” aux renseignements.
- Je vois.Et j’en reste sans voix.
- Ça me reposera.
- Si je comprends bien, elle travaille à l’horloge parlante ?
- Non, à l’horloge chantante ! C’est beaucoup plus agréable ! Ne trouvez-vous pas qu'ils étaient pénibles ces sons monotones et monocordes : “ Au quatrième top, il sera exactement, etc. Tip... tip... tip... top ! ”
- Oui, c’est vrai, c’était fastidieux. Mais précieux, comme renseignement.
- Éh bien maintenant, c’est précieux, et agréable ! Un jour, le patron, Nel...
- Nel ? C’est son nom ?
-  Non, son prénom. Son nom c’est Léther.
- Ah bon.
- Et bien, Nel a décidé qu’on enregistrerait désormais les heures et les minutes en chansons et musiques, et si vous en avez un jour l‘occasion, je vous conseille de téléphoner à l’horloge chantante : il y a une multitude de versions chantées différentes, avec en fond sonore la “ Danse des heures ” de Ponchielli, vous savez : “ Ti ya ti ta ti..., ti ya ti ta ta. ”
- Ah oui, ça me dit quelque chose !
- Vous connaissez ? Peut-être avez-vous déjà consulté l'Horloge Chantante ? Une fois, on a eu droit à "Heure exquise", cet air si léger interprété par cette délicieuse soprano, la célèbre Time Marie.
- Oui, je sais, c'est ma cousine. D'ailleurs, elle remonte dans mon estime.
- Marie.
- Pardon ?
- Elle s'appelle Marie Time, pas Ness.
- Oui, bref, en tout cas, je connais la musique que vous avez fredonnée. J’ai entendu cette musique déjà quelque part. Mais où ? Quand ?
- Caen ? Je ne pense pas. Allez donc téléphoner à l'Horloge Chantante.
- Pourquoi pas.
- Tenez, il est midi moins le quart à ma montre, mais comme j’avance de trois quarts d’heure, il va bientôt être midi, vu que de toutes façons, elle ne marche pas. Ce serait le moment de téléphoner, si vous voulez. Vous aurez l'heure pile.
- Eh bien, je vous remercie. Je vais vous laisser, maintenant. Au revoir madame Eva.
- E’ va où ? ”

Je laissai Eva dans... ses pensées, et en attendant midi, relançai la lecture du CD pourri.

Sans poursuivre ta lecture, écoute au moins 1mn de la musique n° 7 : "Pardon ?".
--> Pardon ?

Vraiment pourri ce CD. Enfin, l'heure étant certainement arrivée, je téléphonai à l’horloge chantante. Et là, quelle ne fut pas ma surprise : voici à peu près ce que j’entendis :

Sablier percé 13/20



Dernière édition par Pascal le Jeu 8 Fév - 10:27, édité 2 fois

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14Le sablier percé 20 pages Empty MIDI À QUATORZE HEURES Dim 2 Oct - 12:17

Pascal


Admin

Ami lecteur, sans poursuivre ta lecture, écoute donc la musique n° 8 "Midis".
--> Midis

Oui, c'était très joli, mais cela pouvait-il m'avancer ? Il ne fallait négliger aucun détail. Et de toutes façons, il me fallait retourner chez Delphine, au risque de la réveiller, pour la prévenir de l'inefficacité de mes recherches. En étant positif, je pouvais toujours dire que j'avais pu éliminer certaines pistes. Et que j'en tenais une autre. Oui, ça, c'était bon. Allez, en route, et écoutons encore une petite chanson.

Ami lecteur, écoute donc la musique n° 9 "Chasse heures" tout en te rendant chez Delphine.
--> Chasse heures

Je sonnai longtemps (une heure ? un jour ? une année ?) avant que la voix rocailleuse de Delphine m'accueillît. Après l'avoir mise au courant des derniers évènements, je lui signalai que son lecteur de CD était un peu esquinté.
"Mais non, dit- elle en baillant, c'est le disque, il a été mal enregistré.
- Et vous l'écoutez quand même ? Vous êtes courageuse !
- Merci. J'ai mes raisons.
- Excusez-moi, je comprends que vos souvenirs doivent y être liés. Qui vous a fait cet enregistrement ?
- Un ami, un ami. Maintenant, laissez-moi, je vous prie, je dois me préparer, j'ai bal costumé ce soir.
- Oh oh ! Avez-vous un cavalier, très chère ?
- Certainement pas ! Il ne faut pas !
- Ah ? Euh… (Raté) ! Et pourquoi cela ?
- Je serai Cendrillon, je dois donc être seule. Au douzième coup de minuit, je m'enfuirai en perdant un de mes souliers, et demain mon prince viendra me chercher.
- Très romantique ! Je vais vous laisser y rêver encore un peu. Mais j'insiste : pouvez-vous me donner l'adresse de l'ami qui a enregistré le disque ?
- Oh, il travaille dans une salle de mixage, à deux minutes d'ici. Allez-y donc !
- Merci, j'y vais, j'y vais. Après, j'aimerais bien qu'on s'occupe un peu de mon salaire !
- Pensez-vous, il n'y a rien à faire, mon pauvre vieux ! Même la chirurgie esthétique ne pourra pas vous donner un air aussi franc.
- Euh… ce n'est pas beaucoup !… J'aimerais un peu plus plus que six francs !
- Nous verrons cela une autre fois, inspecteur.
- Bon. Comment s'appelle votre ami ?
- Eddy Skjocay.
- Que fait-il, fille ?
- Il mixe, mec.
- Il est DJ (Disc-Jokey), quoi ?
- Non, il est JD (J'ai Dit) coit.
- Parfait. Je peux vous emprunter encore votre disc-woman ? J'aimerais écouter la fin du disque. Moi, quand je commence quelque chose, je vais jusqu'au bout.
- Espérons que ce soit dans le bon sens ! Au revoir, inspecteur.
- Au revoir, cliente."

Ami lecteur, tout en lisant, écoute donc la musique n° 10 "Pied de poisson".
--> Pied de poisson

La salle de mixage était à deux minutes, avait dit Delphine. Deux minutes à pied ? À ski ? En voiture ? À vol d'oiseau ? Cela me rappelait les panneaux publicitaires embellissant le paysage et indiquant : "Supermarché à 1mn". Ne vous avisez pas d'y aller à pied : une minute en voiture en vaut une vingtaine à pied ; en outre, l'indication de temps est toujours minimisée de 50 à 200 %. Finalement, une minute véhiculée correspond à une bonne demi-heure de marche.
Demi-tour, je retournai chez Delphine. Pour éclaircir mes interrogations, je lui demandai quel moyen de locomotion je devais utiliser. C'étaient bien mes pieds, m’affirma-t-elle. Bon. Deux minutes à pied, ça ne devait pas être bien loin. En tout cas, ce ne serait pas long ! J'y repartis.
"Mais… À pieds d'accord, m'affirmai-je, mais les pieds comment ? Les pieds nus ? En chaussettes ? En semelles caoutchouc ou élastomère ? En mocassins ou en tongues ? En charentaises ou en godillots ?" Les explications de Delphine manquaient de clarté. Je repartis la questionner de nouveau.

Ami lecteur, si tu as écouté au moins 40 secondes, tu peux cesser l'écoute de la musique.


Sablier percé 14/20



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15Le sablier percé 20 pages Empty À PIED Dim 30 Oct - 10:54

Pascal


Admin

"Je n'en sais rien, dit-elle. À votre convenance, certainement.
- Pourtant, je suis persuadé que les performances seront différentes selon que l'on chausse du 36 ou du 44, fillette, lui balançai-je savatement  (car j'en connaissais un rayon sur les pantoufles).
- Bien entendu. Vous devriez expérimenter toutes ces merveilleuses possibilités et rédiger une thèse (qui, comme son nom l'indique, ne peut être qu'écrite).
- Pourquoi pas ? Je crois bien que je n'écrirai pas de charre en thèse.  Si j'en avais le temps, répliquai-je.
- Pensez déjà à récupérer le mien, s 'il vous plaît. Et sans m'en faire perdre davantage.
- Oui, j'y vais de ce pas. À pied. Mais au fait, de quel pied s'agit-il donc ? Pied anglais, allemand ? Pied marin ? Pied ferme ? Pied de mouton ? Pied de Vestale ? Pied thon ?  Pied de biche ? Pied rail ? Pied sept ? Pied rôt ? Pied noir ? Pied de poule ? Pied Tégalà3,14 ? Comment procédez-vous ?
- Lorsque je m'y rends personnellement, sachez que j'utilise mes propres pieds, ceux-là mêmes que la nature m'a alloués.
- Vos pieds propres ? En ce cas, chère Delphine, me permettez-vous de vous les emprunter ? Je vais jusqu'à la salle de mixage, puis au retour passerai par la laverie automatique pour vous les rendre dans un bon état de fraîcheur, avant qu'ils ne deviennent pieds-rimés.
- Inutile : je pense qu'après une telle balade, vous serez entièrement lessivé.
- C'est clair.
- Mais je ne peux vous prêter que mon pied gauche, l'autre l'est encore davantage, et par ailleurs je m'en sers ce soir au bal pour perdre mon soulier vers minuit.
- Ah, mais je peux vous prêter une de mes chaussures si vous le désirez, vous ne la perdrez que plus aisément.
- Certes, cher, mais demain, lorsque le prince viendra me chercher... Franchement, je ne tiens pas à imaginer la tête d'un prince qui rechercherait le possesseur d'un tel croquenot !
- Je comprends, pardonnez-moi, je vais me débrouiller.
- Oui, il serait temps, si je puis dire.
- Un dernier renseignement, cependant."

Je voyais bien que je commançais doucettement à lui chatouiller les nerfs comme avec un marteau-pilon, alors je posai ma question très rapidement.

"Comment dois-je marcher ? À reculons ? Sur le côté ? En avant en arrière à cloche-pied en crabe en sautillant sur les mains les genoux en sautant comme un pou ou en faisant  joujou à pousse-caillou mon bijou ?
- Eh bien, mon chou, volez-y donc comme un hibou !" me claqua-t-elle la porte au nez.

Elle était sacrément tabou, cela ne faisait pas de boute.
Je rouvris gentiment la porte pour récupérer mon nez et me mis en route cette fois-ci pour de bon. Avec l'idée certes géniale mais également ingénieuse d'imiter la façon de marcher de Delphine.
Recroquevillant du mieux possible mes orteils pour arquer au maximum ma voûte plantaire, et roulant de gauche à droite mon bassin, je commençai à voltiger vers la salle de mixage.
Mais bon sang, dans quelle direction devais-je aller ? Vers le nord ? Le sud ? L'ouest ? Le centre de la terre ?
Las, je hélai un taxi : "Hé ! Là !"

Un taxi s'arrêta à ma hauteur pour me demander : "C'est combien, m'sieur ?"
Oh ! Le goujat !

"Vous vous méprenez, monsieur, je voudrais aller à la salle de mixage.
- Ah ! Mais c'est à deux minutes !
- C'est ce qu'on m'a affirmé également. Pouvez-vous y aller ?
- Oui, bien sûr !"

Il embraya, et fonça vers la salle de mixage, me laissant tout bête sur le bord du trottoir. J'en étais quitte pour héler un autre taxi, mais cette fois-ci, je m'assis dans celui-ci. Je remâchai quelques brins de foin.

"Allez-y, dis-je, roulez deux minutes.
- Bon."

Deux minutes plus tard, je dis au taxi zélé que j'avais hélé :
"C'est bon, déposez-moi. Combien vous dois-je ?
- Deux milliards.
- N'est-ce pas un peu cher ?
- Certes.
- Vous en convenez.
- Oui. Mon compteur est déréglé. Il ne se remet plus à zéro. Alors faut que je m'en rachète un autre, vous ne croyez pas ?
- Oh, mais si, comment donc ! Vous acceptez les chèques ?
- Ah non, je ne le tolère pas !
- Bon alors comment vous payé-je ? En Pas-francs, en Ivres ? En Pleurins, en Maleuros ? En Dollors, en Manks ou en Dolarmes ?
- Peu importe, tout ça c'est blanc-monnaie et monnaie-blanc.
- À moins que je vous paie au noir.
- Avec de l'argent sale ?
- Non, avec des monnaies de nuit. L'argent qui dort.
- Ah, des roupiyes !
- Voilà. C'est ça."

Sablier percé 15/20



Dernière édition par Pascal le Jeu 8 Fév - 10:33, édité 2 fois

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16Le sablier percé 20 pages Empty MIX MAX Dim 6 Nov - 12:30

Pascal


Admin

Sortant du taxi, j'entrai directement dans la première salle qui se présenta à moi et demandai à rencontrer Maître Eddy Skjocay, le JD coit.
Il était là, dans la salle, à sa table de mixage, en train d'effectuer de savantes manipulations (enfin, savantes pour lui, hein, pour moi tout cela n'avait pas plus de mystères que les femmes) ; poussant des curseurs de volume, enclenchant des interrupteurs d'égalisation, déplaçant des manettes de vibrato, tournant des potentiomètres de réverbération, tirant des leviers de portamento, appuyant sur des pédales de sustain, lançant un pattern, en stoppant un autre… De la frime ! Ou de la coquetterie.
Je craignis de déranger le mix-coquet, mais il s'approcha de moi en marchant de côté, tel un crabe-tambour ou un serpent-do.

"SEQ 2047 : De j'ai votre Delphine par téléphoné m'a qui arrivée été de prévenu. BIP ! FIN SEQ 2047.
- Enchanté. Je dirais même ravi. Positivement ravi (mais qu'est-ce qu'il me racontait ?).
- SEQ 2048 : Merci. Vous puis-je que pour ? PAUSE ON.
- Ah oui. Là, je comprends mieux. Parce que, veuillez m'excuser, je ne parle que le français, et encore, juste le français moyen, le français du milieu de la France, le "ranç".
- PAUSE OFF. Compris ! - PAUSE - N'instant ! STOP.
- Euh ? Un instant ?
- STOP SEQ ! RETOUR - REMBONINAGE Vvviiiiiouuuulppt ! Feuleup feuuleup feuleup clic ! ARRET PISTE ALEATOIRE.
- Je vous en prie faites donc.
- RELECTURE SEQ 2047 : Delphine arrivée m'a j'ai de préve… STOP SEQ 2047 – SEQ 2049 : De bouton ah cochonnerie ! Veut quand il il marche ! STOP !
- Visiblement vous avez un petit ennui. Je ne voudrais pas être indiscret, mais est-ce que vous ne seriez pas un peu taré ?
- ARRET SEQ ALEATOIRE – SEQ 2050 : Si, mais vous pas ne regarde ça. PAUSE.
- C'est sûr. (Il n'est pas taré, il est toqué ! Le mix-toqué !)
- SEQ 2051 : Sortir moyen pas de s'en aujourd'hui. PAUSE. Vous sais chercher que je ce venu êtes. STOP SEQ 2051.
- Ah bon. Mais finalement, dans l'ensemble, on n'a pas trop à se plaindre. Il fait assez beau pour la saison.
- SEQ 2052 - MODULATION FREQUENTIELLE : Luuii l'eeest illlll fouuuu ! STOP.
- Enfin, je veux dire, pour un mois de juin, on a un bel arrière-hiver. Pensez-vous qu'il neigera bientôt ?
- SEQ 2053 - TRANSPOSITION 3 TONS - VOLUME PLUS 25 : N'importe quoi ! - PAUSE - Tiens ? - PAUSE - Correcte de dit bout j'ai phrase un ! - PAUSE - Ah ! - PAUSE - Recommence alors zut ça.  STOP.
- Bon. Je ne vais pas me retenir plus longtemps.
- SEQ 2054 : ECHANTILLONNAGE VOIX ZEUS : Attendez plaît s'il vous ! STOP.
- Euh… Oui."

Je préférais rester moi-même coit, et laisser aboyer le mix-roquet.
Alors Eddy le JD pas coit entama une série de manipulations très étrange. Il se déplaçait d'un endroit à un autre (ce qui était tout de même plus facile que de se déplacer d'un endroit au même endroit), d'une manette à une autre, d'un levier à un interrupteur ; il paraissait se mouvoir soit en marche arrière, soit sur le côté, et semblait vouloir faire un montage sonore, ce qui était tout à son nonore.
Il rembobina  tout d'abord la bande originale, qu'il fit passer dans le lecteur A, tandis qu'il lançait un enregistrement sur l'appareil B ou C en fonction de ce qu'il entendait.
Puis il rembobina la K7 de l'appareil C, la plaça en A, tandis qu'il plaçait en C une K7 vierge.
Et recommença la séance de duplication par séquences. Seule la K7 B ne changeait pas de place, et recevait les informations par petits bouts les unes après les autres. Et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il ne restât plus rien sur la K7 C.
Et miracle ! Après seulement trois ou quatre heures de réenregistrement, les 2 minutes de conversation étaient enfin audibles, et compréhensibles ! Et je commençai à saisir ce qui avait dû se produire avec certaines bandes audiophonqiues que Delphine lui avait fournies.
Ainsi, le CD vierge que j'avais écouté par mégarde était certainement le résultat d'un duplicata de ce qui restait dans l'appareil C en fin de manipulation.
Et donc… et donc ! Mais oui ! C'était bien sûr !

Vite ! Il fallait que j'en aie le cœur net ! Retourner chez Delphine !
Par chance, c'était à deux minutes ! Je pris congé d'Eddy le JD coit, et remis mon walk-girl en route.

Sablier percé 16/20



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17Le sablier percé 20 pages Empty LE REVERBERE Sam 26 Nov - 15:34

Pascal


Admin

Ami lecteur, tout en lisant, écoute donc les musiques 11 à n° 13 du "Sablier percé".

--> 11 : Dernière heure
--> 12 : Lettreur
--> 13 : Interrogeur

Dans la rue, je recommençai à imiter la démarche de Delphine. Ah oui, mais à quelle vitesse devais-je me déplacer ?

La question était de taille, mais la réponse était si simple : peu importe la vitesse, il me suffisait de marcher par exemple sur place et de patienter deux minutes.
Tout en piétinant joyeusement le bitume chauffé par les rayons glacés d'un soleil de fin d'hiver, j'eus l'étrange sensation d'être suivi…
Me retournant le plus discrètement que je pus, l'air de rien, je m'aperçus très vite que j'étais effectivement suivi par un réverbère !

Je décidai d'accélérer l'allure de mon surplace afin de le semer. Je piétinai de plus en plus vite, tout en prenant bien le soin de faire semblant de ralentir : j'étirais les bras, et baillais comme si j'allais m'endormir. Et brusquement, je changeai d'allure et moulinai les jambes comme le champion cyclixx Eddyxx Merckxx pédalant dans la frite.

En me retournant, je fus agréablement surpris de constater que j'avais légèrement semé le lampadaire, et que j'avais pris au moins vingt centimètres d'avance. J'étais soulagé, mais non pas pleinement satisfait. Je ne comprenais pas quelles pouvaient être les motivations profondes de ce reverbère et j'étais relativement soucieux. Peut-être ne travaillait-il pas seul ? Mais qui pouvait avoir intérêt à me faire suivre ainsi ?

Je décidai de prendre intégralement les choses en main, et de ne plus subir ce doute ou les inquiétudes d'un hypothétique contrat lancé sur moi par la Mafia des Lampadaires.
Après avoir ralenti, je fis soudain volte-face et, tout en regardant le reverbère droit dans l'ampoule, entamai la poursuite à l'envers.
"Cette fois, c'est moi qui te suis ! pensai-je tout haut tout en titubant très bas. Qui que tu sois, où que tu ailles, je te suivrai !"

Était-ce le vent du soir qui forcissait ? Était-ce ma vue de jaguar qui faiblissait ? Toujours est-il qu'il me sembla que le réverbère avait légèrement tremblé, et que désormais il cherchait à fuir.
La poursuite s'engagea, féroce, acharnée, impitoyable. Elle dura des heures. Le lampadaire paraissait nerveux et zigzagait sur place à qui mieux mieux tout en feignant de ne pas bouger. Ah ! Ah ! Malin, le gars ! Mais on ne me la faisait pas, à moi. Il en fallait plus pour me duper. Je dus néanmoins forcer l'allure plusieurs fois pour ne pas décrocher.

L'adversaire était coriace ; il me fallait ruser. Je décidai de le laisser prendre quelques mètres d'avance pour qu'il se sente en sécurité, et me mis à reculer progressivement, imperceptiblement, jusqu'à tourner à un coin de rue derrière un bloc de bâtiments. Alors, je m'accordai quelques instants pour souffler, car cette poursuite qui durait depuis plus de deux heures m'avait épuisé. Ce fut la seule erreur que je commis.
Jetant un coup d'œil sur mon adversaire, je vis que c'en était fait : le réverbère m'avait semé ! Je crus voir sa lueur s'évanouir dans la nuit fraîchement tombée.
Fourbu, mais néanmoins peu fâché de m'en être débarrassé, ce qui finalement était mon but premier, je repris ma marche en avant pour me rendre chez Delphine.

Cette course m'avait malheureusement éloigné de ma destination, et je décidai pour me donner du courage de me remettre un peu de musique. « Et tiens ? Si j'écoutais plutôt l'horloge chantante ? » me demandai-je.
Et sans attendre ma réponse, je composai sur mon portable le numéro des renseignements horaires téléphonés. Ce que j'entendis me stupéfia.

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